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BALAOO

Une officielle ! Une officielle pour M. le Maire ! Ouvrez, monsieur Roubion, c’est très pressé.

Sur l’ordre du Maire, la porte fut entr’ouverte et Mme Godefroy apparut. Elle avait cette même pâleur mortelle, ces mêmes yeux hagards qui étaient entrés en même temps que le docteur Honorat. Un papier jaune tremblait entre ses doigts. M. le Maire s’empara de la dépêche ; il lut tout haut le texte de l’officielle : « Préfet Puy-de-Dôme à Maire Saint-Martin-des-Bois. Trois frères Vautrin échappés aujourd’hui de la prison de Riom ; faites nécessaire. »

Le Maire, qui ne disposait en fait de force armée que de l’appariteur et de son tambour, laissa tomber un regard atone sur tous ceux qui l’entouraient. Ces pauvres gens paraissaient n’avoir plus la force de respirer. M. et Mme Sagnier, M. et Mme Valentin se tenaient étroitement enlacés, formant deux couples comme on en voit sur les images qui représentent les premiers ménages chrétiens promis aux bêtes. M. Honorat, sur sa chaise, ne donnait plus signe de vie. La vieille petite troupe des brodeuses se serrait autour de la puissante Mme Roubion qui s’efforçait en vain, les deux mains posées à plat sur sa vaste poitrine, de commander aux mouvements de son cœur. Enfin, la terreur était telle que Mme Toussaint elle-même, que soutenait Mme Boche, laquelle était soutenue par Mme Mure, laquelle ne lâchait pas la main de Mlle Franchet, en avait cessé de gémir sur la disparition de la robe de l’Impératrice.

Le Maire répétait : « Faites nécessaire… Faites nécessaire… il est bon, lui, le préfet… Quel nécessaire veut-il que je fasse ? C’est à lui de faire le nécessaire… Il devrait déjà nous avoir envoyé des gendarmes !… Il devait