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BALAOO

je t’enverrai te dandiner dans les rues du village, et les petites de l’école se moqueront de toi, Balaoo ! (Balaoo pense : « Va donc demander à Camus et à Bombard que l’on a trouvés pendus pourquoi je les ai envoyés se dandiner au bout d’une corde ! »)[1].

Mais Balaoo n’est pas au bout de ses peines.

Son maître l’a fait asseoir et lui a enlevé lui-même ses souliers et même ses chaussettes (Pourquoi donc, en apercevant les chaussettes, le monsieur qui met les voleurs en prison a-t-il eu ce mouvement du corps et ce coup de tête ? Balaoo pense : « La vue de mes mains de souliers le dégoûte, c’est sûr. » Et il s’enfonce deux doigts dans le nez pour comprimer sa fureur).

Coriolis lui prend ses mains de souliers dans ses mains à lui, homme. Balaoo détourne la tête pour ne pas assister à un spectacle qui lui répugne. Mais il faut qu’il entende :

Coriolis. — Vous voyez bien que le gros orteil du pied, plus long que chez l’homme, est au contraire bien plus flexible, et peut s’opposer au reste du pied. (Balaoo pense : « Pourvu qu’il ne me chatouille pas ! »)

M. Herment de Meyrentin. — Je vois ! je vois ! c’est incroyable !… Un quadrumane ! un quadrumane ! qui parle !… Euh ! euh !… c’est incroyable !

Coriolis. — Toutes les bêtes parlent, mais le quadrumane, qui est une bête supérieure, possède plus de sons distincts que les autres animaux pour exprimer son désir, son plaisir, sa faim, sa soif, son effroi, etc. C’est donc un langage. Chez mon anthropopithèque, qui

  1. Ceci est terrible pour Balaoo qui ne savait pas que Camus et Lombard étaient boiteux et qui a cru qu’ils se moquaient de lui et imitaient en marchant son dandinement dans la rue, pour quoi il les avait pendus !…