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BALAOO

sement Herment de Meyrentin, je ne lui ai encore vu que deux mains !…

— Balaoo ! déchausse-toi !

Balaoo croit avoir mal entendu ! Mais non ! Coriolis répète l’ordre abominable : Se déchausser !… lui à qui on a toujours défendu de montrer ses mains de souliers ! et qui a été élevé dans l’horreur de ses extrémités postérieures !… et qui n’en a jamais dévoilé le mystère que devant les frères Vautrin, au plus profond de la forêt, aux jours de chasses défendues !… quand il leur apprenait, dans les arbres, à se construire de petites huttes invisibles…

Eh bien ! non ! il ne se déchaussera pas ! c’est trop de honte, à la fin ! Et il se lève, les mains dans les poches et sifflant un petit air comme s’il pensait déjà à autre chose. Étonnement ! les autres ne lui disent rien ! Ils l’observent dans sa marche, car Balaoo marche de long en large, le front pensif comme on fait quelquefois chez soi quand on a des préoccupations. Il a oublié qu’il n’a plus de fond de pantalon. Un coin de conversation surpris entre ses deux hôtes le lui rappelle.

— Vous voyez, il n’a pas d’appendice comme on en voit aux quadrumanes inférieurs : pas de queue et pas de callosités !… En outre, les os du bassin que nous appelons ischion et qui forment la charpente solide de la surface sur laquelle le corps repose chez l’individu assis, ces os sont moins développés que chez les quadrumanes à callosités et sont plutôt constitués comme chez l’homme. Enfin, il marche ordinairement avec lenteur et circonspection et je lui ai fait perdre l’habitude de se dandiner…

Justement, Balaao, agacé, se met à se dandiner.

— Dandine ! Dandine donc ! fait Coriolis furieux…