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ment marquées au moment de la colère ou d’une inquiétude d’âme. Malgré la couleur claire de ses cheveux, ses moustaches et ses sourcils étaient noirs, signe de race chez un homme, comme la crinière et la queue noires chez les chevaux. Afin de vous finir ce portrait, il faut vous dire qu’il avait le nez un peu retroussé, les dents éblouissantes de blancheur, les yeux bruns, Mais de ses yeux je dois vous dire encore quelques mots :

D’abord ils ne riaient pas, lorsque lui-même souriait. Ne vous est-il jamais arrivé de remarquer cette chose étrange chez quelques hommes ? C’est l’indice ou d’un caractère méchant ou d’un chagrin profond et permanent ! À travers ses paupières à demi-baissées, ils brillaient d’une certaine clarté phosphorescente, si l’on peut s’exprimer ainsi. Ce n’était point le reflet d’une âme ardente ou d’une imagination enjouée, c’était un éclat pareil à celui de l’acier poli, éblouissant, mais froid. Son regard mobile, mais pénétrant et fatigant vous laissait une impression désagréable d’interrogation indiscrète et pouvait même paraître insolent, s’il n’eût été aussi indifférent et aussi tranquille. Toutes ces