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L’ONCLE BARBE-BLEUE

au boiteux ; un livre, puis une petite voiture mécanique pour le pauvre garçon qui n’était jamais sorti de sa chambre, sans parler de cadeaux plus utiles pour leur bien-être matériel et celui de leurs parents.

— À quoi servirait d’être riche, si l’on ne savait pas partager, disait Valentine.

On partageait donc, et la joie que ressentait Luis en voyant le bonheur qu’il versait à pleines mains le récompensait amplement. Il ne pensait plus à être envieux de personne ; il ne craignait plus d’être un objet de répulsion ou de raillerie ; il ne voyait partout que des figures amies et reconnaissantes. « Le Petit Monsieur du Château » était vite devenu l’idole des enfants du voisinage, malades ou bien portants, et tous lui témoignaient leur gratitude à leur façon, par des sourires, des regards, des fraises des bois, des framboises parfumées, des myrtilles bleues, dont on lui apportait des paniers entiers, tandis que « la Jeune Demoiselle » recevait tant de bouquets, qu’elle ne savait plus les mettre, malgré sa passion pour les fleurs.

« Sais-tu, dit Valentine un jour que Luis s’apprêtait à donner un magnifique volume doré sur tranches au petit boiteux dont l’infirmité l’intéressait tout particulièrement, sais-tu que c’est ce livre qui m’a mise sur la voie des découvertes.

— Comment cela ?

— Oui, regarde.

Et, du doigt, elle souligna le titre :

Les aventures du célèbre Pépé.

— Je ne vois pas comment.

— C’est une nouveauté de cette année, Jacques en avait assez envie au jour de l’an ! Quand je l’ai trouvé au grenier,