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L’ONCLE BARBE-BLEUE

« Nous devons être dans les appartements de l’Oncle », murmura Geneviève.

Ceci n’était pas fait pour les rassurer. Que dirait M. Maranday, s’il les trouvait errant dans un endroit défendu ? Placées entre deux dangers qui leur semblaient également formidables, elles n’osaient ni avancer, ni reculer. Fort heureusement, l’ennemi ne les avait point poursuivies, mais elles craignaient à tout instant de le voir reparaître, et vous ne les eussiez pas fait remonter au grenier pour un empire.

Qu’était-ce que cet individu mystérieux devant lequel elles fuyaient.

« Un diable », disait Geneviève.

« Un revenant », ajoutait Charlotte.

Valentine ne disait rien, mais son imagination vive et sa nervosité maladive lui suggéraient les choses les plus saugrenues.

Quelle que fût la personne, homme ou femme, qui les avait tant effrayées, les petites filles ne pouvaient songer à rester longtemps serrées l’une contre l’autre, dans ce couloir sombre. Faisant appel à tout son courage, Geneviève, qui passait à bon droit pour la plus brave, tourna le premier bouton de porte qui lui tomba sous la main. Son cœur battait bien fort. Si elles allaient se trouver nez à nez avec M. Maranday ? Un oncle « ordinaire » eût difficilement pardonné une telle intrusion, mais cet oncle si bizarre ne l’excuserait jamais.

Et les trois petites filles eurent la même pensée :

« Pourquoi avons-nous désobéi ? pourquoi sommes-nous allées au-delà des limites permises ? »

Par bonheur, il n’y avait personne dans la pièce où entrèrent les trois fillettes, et, avec la mobilité d’impressions