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L’ONCLE BARBE-BLEUE

place pour vous maintenant à mon foyer pendant l’hiver. Vous n’êtes même pas ma débitrice, car à la saison prochaine, quand vous serez remise de vos fatigues, vous m’aiderez à remplir mes greniers vides ; non pour moi, mais pour vos pareilles, afin de pouvoir les servir à l’occasion. Vous apprendrez ainsi à joindre l’utile à l’agréable…

— Mais écoutez-la donc refaire la Fontaine !

— Assez de plaisanteries, mesdemoiselles, nous avons encore une enveloppe à décacheter.

— Voyons, voyons.

— Geneviève a peut-être gardé le meilleur pour la fin, dit Marie-Antoinette.

— Eh bien ! parle, qu’attends-tu ? qu’est-ce que c’est ?

Jeanne d’Arc, dit Geneviève à demi-voix, et comme si elle craignait à son tour les critiques.

— Jeanne d’Arc ! pourquoi pas ? dirent les unes.

— Jeanne d’Arc ! répétèrent les deux autres, que pourrions-nous faire d’un pareil sujet ? d’ailleurs, il n’y a qu’un rôle de femme.

— Moi, j’y vois une foule de tableaux, s’écria Valentine, qui « s’emballait » vite, même sur les idées des autres.

— Dis un peu, fit Élisabeth, très ergoteuse de sa nature.

— D’abord, une scène dans les champs, avec des apparitions, comme à l’Hippodrome, dit Marie-Antoinette.

— Du tout : une scène dans sa famille. Elle a des sœurs très positives, qui la taquinent parce qu’elle laisse perdre ses brebis, mais elle ne pense qu’à la France, si malheureuse à cette époque.

— Viennent alors les apparitions, dit Geneviève.