Page:Lerberghe - La Chanson d'Eve.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


La nuit sombre y mirait leurs lointaines images,
Et le jour le soleil, l’azur, et nos visages.
Or, un matin du doux printemps, que la corolle
Radieuse du blanc soleil dormait sur elles,
Nous vîmes, au milieu, comme une petite onde
Dans la calme clarté s’ouvrir, devenir grande,
Et venir jusqu’à nous : Ô sœurs ! qu’est-ce qui monte,
Chantions-nous, du sein des belles eaux profondes,
Qu’est-ce qui monte jusqu’à nous ? C’étaient des cimes,
Des cimes blanches qui montaient comme des cygnes,
C’étaient des neiges dans l’air rose, des nuages,
Se dissipant en fleurs, s’étendant en feuillages,
Une corbeille immense, un éclatant berceau,
Que d’invisibles mains élevaient sur les eaux ;
C’était une île sur les mers, une île pleine
De soleil, de bosquets de roses, de fontaines,
Qui naissait de l’abîme en sursaut de clartés.
D’un long souffle de fleurs tout l’air fut éventé.
Mille vagues, parmi leur rumeur éternelle,
S’en furent par le monde apporter la nouvelle,
Et soudain, dans un vol tournoyant d’ailes blanches,
Du fulgurant soleil descendirent tes anges.