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LE MANOIR DE VILLERAI

le signal de se déployer en avant des retranchements : l’ennemi s’ébranlait.

Le général Abercromby forma son armée en quatre colonnes pour attaquer sur tous les points à la fois, et les grenadiers et l’élite des soldats, choisis pour conposer la tête des colonnes, eurent ordre de s’élancer contre les retranchements, la baïonnette en avant, et de ne tirer que quand ils auraient escaladé les retranchements de l’ennemi. En même temps, un certain nombre de soldats devait descendre la rivière à la chute pour menacer le flanc gauche des Français. À une heure les colonnes anglaises se mirent en mouvement, entremêlées de troupes légères, parmi lesquelles il y avait des indiens, qui, cachés derrière les arbres, firent le feu le plus meurtrier. Les colonnes sortirent du bois, descendirent dans la plaine en avant des retranchements et s’avancèrent avec une assurance et un ordre admirables, les deux premières contre la gauche des Français, la troisième contre leur centre et la dernière contre leur droite, en suivant le pied du coteau où se trouvaient les Canadiens. Le feu commença par la colonne de droite des assaillants, et s’étendit graduellement d’une colonne à l’autre jusqu’à celle de gauche, qui chercha à pénétrer dans les retranchements par le flanc droit des troupes du chevalier de Lévis. Cet officier, voyant leur dessein, ordonna aux Canadiens de faire une sortie et d’attaquer en flanc cette colonne composée de grenadiers et de montagnars écossais.

Les Canadiens étaient divisés en quatre brigades, commandées chacune respectivement par MM. de St-Ours, Raymond, de Gaspé, de Lanaudière, et elles réussirent à rejeter les assaillants sur la droite. Pendant trois heures, les Anglais continuèrent à charger avec la plus grande bravoure ; mais enfin, après des prodiges de valeur des deux côtés, le général Abercromby, voyant qu’il n’y avait plus pour lui d’espoir de succès et voulant prévenir une défaite complète, prépara la retraite de son armée, qui put se retirer en bon ordre, après avoir eu cependant beaucoup d’hommes tués et blessés, entre autres un grand nombre d’officiers[1]. Abercromby ne

  1. Ils avouèrent eux-mêmes, dit Garneau, 2,000 hommes tués et blessés, dont 126 officiers ; toutes les correspondances françaises les portent de 4,000 à 5,000. (T. )