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chaos de bandes blanches qu’elle voyait devant elle, Paul rentra, accablé par la chaleur et la fatigue de son travail sous un soleil brûlant.

Elle saisit vivement, comme par instinct, cette couture qui avait fait si peu de progrès depuis le matin, et jeta la vue sur son mari. Il venait de s’asseoir, et essuyait les larges gouttes de sueur qui perlaient sur son front en feu. Il y avait contraste entre sa fatigue jointe à la chaleur qui l’écrasait, et le repos dans lequel elle était au milieu de cette chambre sombre et respirant le frais ; et cependant, ainsi entourée de ses aises combien elle se sentait abattue, nonchalante, malheureuse !

— Eh ! bien, petite femme, comment va la couture ? demanda-t-il avec bonté.

Elle la rejeta de nouveau, et fondant en larmes, elle se mit à sangloter.

— À quoi sert, dit-elle, de feindre plus longtemps ? Je n’y entends rien. Paul, Paul, tu as une femme inutile, indigne !

Repoussant l’ouvrage, Paul attira sa femme à lui avec tendresse, en murmurant :

— Le ciel m’est témoin, Geneviève, que tu me rends le séjour de ma maison agréable et heureux. Que peut faire de plus une femme ? Ne vas pas te tracasser l’esprit à propos de semblables bagatelles. Ta douceur et ta patience te rendent plus chère à ton mari que si tu étais la meilleure cuisinière et la couturière la plus entendue de la paroisse ! Attaches tout cela dans un paquet, et ce soir,