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Dans la première explosion de colère provoquée par tant de franchise, Délima montra la lettre à son mari ; mais elle était loin de s’attendre à l’amertume avec laquelle il lui reprocha d’avoir fait une telle demande sans le consulter, et le manque d’orgueil et de dignité qui l’avait conduite à demander des secours de cette manière.

Peu à peu cette partie de la somme qui devait, par son intérêt, leur fournir un petit revenu annuel fut dépensée, Armand en ayant consacré, malgré la volonté de sa femme, une part à payer des dettes insignifiantes qu’il avait contractées durant les premiers mois de leur mariage. Ainsi placé à deux pas de la pauvreté, il jugea que le retranchement était impérieusement nécessaire : la servante fut renvoyée, les dépenses pour la toilette et la table diminuées, et Délima, changeant tout-à-coup d’un extrême à un autre, passa de la condition d’une poupée extravagante à celle d’une femme très-négligente au dernier point. Naturellement, le caractère participa aussi à ce changement et ce fut pour le pire ; aussi les regards de colère et les ennuyeuses récriminations sur sa misérable destinée étaient maintenant tout ce qu’il y avait dans l’infortunée demeure de notre héros.

L’étrenne annuelle de cinquante louis envoyée par madame Ratelle arriva à temps pour les sauver du besoin immédiat ; Armand, après des efforts désespérés, se procura un peu de copie qui ne lui rapporta qu’une rémunération insuffisante du rude labeur