XVI.
Ce fut pour Délima un jour de triomphe que celui où, après avoir parcouru avec son mari une partie de la ville à la recherche d’une habitation qui réalisât l’idéal qu’elle avait rêvé, ils trouvèrent pour un prix modique, sur la rue St. Joseph, un cottage contenant le nombre voulu d’armoires et de cabinets, et ayant par devant la petite véranda que la jeune femme regardait comme indispensable. Aussi fut-elle très-joyeuse lorsque Armand, qui éprouvait l’aversion ordinaire à son sexe pour faire les emplettes, lui remit, avant de partir pour son bureau, une bourse bien remplie et lui donna carte-blanche pour en dépenser le contenu à son entière discrétion.
Naturellement, le premier soin de Délima fut d’aller chercher madame Martel. Cette terrible matrone fit le désespoir des commis d’une douzaine au moins de magasins en marchandant, barguignant et changeant d’idées plusieurs fois avant de conclure des marchés. Sa coopération fut cependant d’une grande utilité à la jeune femme qui débutait comme ménagère, car sans l’intervention de sa compagne, Délima, guidée par les mêmes goûts qui l’avaient dirigée dans l’achat de ses robes, aurait mis les trois quarts de son capital sur un tapis coûteux, embelli de roses et de lilas, et sur des meubles de salon qui devaient bien faire avec ce