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— Armand, nous nous rencontrons dans un bien triste moment ! Si tu étais arrivé une heure après, il aurait été trop tard !

— Oui, j’aurais été volé de la bénédiction de mon père comme de mon héritage. Paul, tu me dois un compte terrible, — et il lui montrait la lettre interceptée — mais à côté du lit de mort de mon père j’ai promis d’y renoncer.

Les joues basanées de Paul devinrent d’un gris cendre, et il marmotta d’une voix inintelligible quelque chose sur ce qu’il avait accidentellement oublié la lettre en question.

— Oui, de même que les autres ont été oubliées ! répondit Armand avec amertume. Quoiqu’il en soit, j’ai promis de n’en rien faire : ainsi, trêve de discussion. Le monde est vaste : dorénavant tu iras ton chemin et moi le mien ; ce qu’il y a de nécessaire, d’essentiel, c’est que ces chemins soient pour toujours éloignés l’un de l’autre.

Le cœur égoïste de Paul commença à sentir des remords ; ses joues brunies rougirent.

— Armand, bégaya-t-il, il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Mon père a laissé de grands moyens : je partagerai volontiers avec toi. Tu ne me trouveras pas aussi intéressé et rapace que tu penses !

— Tu méconnais peu, si tu t’imagines que je pourrais accepter de l’aide ou une faveur de toi ; non, après ce qui est arrivé, il y aura toujours un gouffre entre nous deux.

Sur ces entrefaites, madame Ratelle qui