ni une paire de fleurets rouillés, un miroir brisé pendu à la cloison et si petit que Lespérance disait souvent qu’il ne pouvait y voir ses traits qu’en détail, c’est-à-dire les uns après les autres. Une paire de raquettes placées en angle droit servait de persiennes à une fenêtre, tandis qu’une traine sauvage bouchait en partie l’autre. La chambre était presqu’entièrement occupée par une table grossière mais nette, probablement empruntée pour la circonstance aux gens de l’étage inférieur. Des bouteilles remplies avec quelque chose de plus fort que la bière de Montréal, flanquaient chaque bout de la table : quelques essuie-mains de grosse toile, un huîlier boiteux et deux seaux vides sur le plancher pour recevoir les écailles d’huîtres, complétaient l’ameublement. Il ne faut pas oublier de mentionner la grande bizarrerie déployée dans les vases pour boire : quelques verres communs, deux pots de faïence blancs et trois tasses à thé, offraient, sinon de l’élégance, du moins de la variété.
Tout-à-coup l’amphitryon, prenant une contenance grave :
— À présent, messieurs, dit-il, une question importante : lavées ou non lavées ?
— Comme de raison, non lavées ! s’écrièrent plusieurs voix. Laissez-les venir sur la table avec leur limon naturel.
— Tant mieux, car mon aimable hôtesse, auprès de qui Gorgone et Méduse auraient été agréables et charmants, m’a informé tout-à-l’heure que j’aurais à les laver moi-même.