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qu’elle devait son bonheur autant à la compassion qu’à l’amour. Sa générosité fut bientôt récompensée, car l’affection ardente que sa jeune femme lui avait depuis si longtemps secrètement réservée ne tarda pas à passer dans son propre cœur et à le remplir tout entier.

Hélas ! une union aussi heureuse et aussi confiante devait bientôt être douloureusement éprouvée. Deux années de bonheur domestique sans mélange de peine ou de refroidissement d’amitié, deux années seulement de douces félicités pendant lesquelles Antoinette vint au monde, leur étaient accordées : après ce temps la jeune femme, toujours délicate, commença à dépérir.

Aucune affection, aucun soin ne purent la sauver, et en peu de mois elle fut arrachée des bras de son époux pour être transportée dans sa dernière demeure terrestre. À peine le premier anniversaire de sa mort était-il arrivé, que madame de Mirecourt alla la rejoindre, laissant le Manoir aussi sombre, aussi silencieux que la tombe.

Le temps fixé pour le deuil étant passé, des amis commencèrent à insinuer au jeune veuf que sa demeure, avait besoin d’une femme qui en prit soin, qu’il était trop jeune pour se renfermer dans un chagrin éternel ; mais il resta sourd à ces conseils, et après s’être procuré dans la personne de l’estimable madame Gérard une excellente gouvernante pour son enfant, il se retira tout-à-fait dans cette paisible soli-