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de sa santé amélioré. De Louis il ne fit pas la moindre attention ; mais celui-ci trouva moyen de se venger en arrangeant plus confortablement son tabouret et en demandant à Antoinette si elle avait encore beaucoup de soie à dévider, disant qu’il était à son service jusqu’au bout. Avec son arrogance et son amour-propre ordinaires, Sternfield se trouva quelque peu déconcerté : le sourire moqueur de madame d’Aulnay, le sans-gêne, pour ne pas dire l’impertinente indifférence de Louis, la bienvenue embarrassée et contrainte d’Antoinette, tout cela formait une réception à laquelle il ne s’attendait guère. Mais il n’était pas homme à se laisser vaincre aussi facilement, et pendant que Lucille triomphait encore de sa mortification, il cherchait un moyen de prendre sa revanche.

Laissant à Antoinette tout le temps de terminer son ouvrage, il attendit que Louis, sur un signe de celle-ci, se fût relevé pour approcher sa chaise de la jeune fille, et manœuvra si bien qu’il l’isola entièrement du reste de la compagnie. Alors il commença avec elle une conversation à voix basse sur un sujet qui, il le savait, absorberait toute son attention.

Louis regardait cette coquetterie évidente et singulière avec autant de surprise que d’indignation. Qu’Antoinette se prêtât à ce jeu, c’est ce qui l’étonnait outre mesure ; et plus il la plaignait, plus intenses devenaient ses sentiments de dégoût pour le militaire. Le visage de la jeune fille avait une apparence de