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et abattu que ni les rayons dorés du soleil, ni l’air agréable qui se répandait dans l’atmosphère ne purent relever, prit place dans la jolie petite voiture de sa cousine.

Arrivées sur la rue Notre-Dame, Lucille qui avait comme de coutume à faire quelques empiètes, ordonna au cocher d’arrêter devant un de ces étroits petits magasins si différents des grands établissements de nos jours.

Elle venait à peine d’entrer, que le léger et gracieux équipage de Sternfield passa. À côté du militaire était assise une de ces jeunes beautés qui avait une part de ses attentions et de ses flatteries. En passant près d’Antoinette, cette demoiselle dirigea vers elle un regard de superbe triomphe.

Antoinette n’était pas remise de la pénible sensation causée par cette rencontre, qu’elle aperçut, venant vers elle, un ami dont la vue fit battre son cœur avec une rapidité extraordinaire : c’était le colonel Evelyn. Croyant qu’il passerait à côté d’elle sans paraître la remarquer, elle détourna les yeux ; mais, lui, cédant à une influence dont il subissait rarement le contrôle, celle de l’impulsion, s’arrêta subitement, s’approcha, et, après quelques paroles de politesse, lui demanda depuis quand elle était arrivée ?

Revenant promptement de son étonnement, Antoinette satisfit en deux mots à cette question.

— J’ai appris que vous aviez été bien malade depuis la dernière fois que je vous ai vue : est-ce vrai ?