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— Comme vous voudrez. Je crois cependant qu’il serait préférable que vous me fissiez vos adieux ce soir.

— Tu es une épouse aimante et dévouée, Antoinette,

— Je suis ce que vous m’avez faite, répondit-elle avec, une froideur écrasante.

— Eh ! bien, puisque tu le désires, bonne nuit ! répliqua t-il brusquement et avec colère. Je ne t’infligerai plus le supplice de ma présence.

Il la laissa, et Antoinette, pensant qu’elle avait assez souffert et qu’elle s’était assez contenue pour ce soir-là, sortit doucement du salon.

La petite chambre qu’elle habitait, avec ses feux pétillants, ses bougies de cire, sa couche d’aisance, avait une apparence agréable et semblait bien propre à reposer de toutes les fatigues ; mais avec quel lourd chagrin Antoinette y entra ! Après en avoir fermé la porte, elle se laissa tomber dans le fauteuil, espérant que les larmes viendraient à son secours ; mais ce grand soulagement lui fut refusé, et elle se mit à repasser dans sa mémoire chaque détail pénible, chaque circonstance douloureuse qui pouvaient ajouter au poids de son chagrin.

Une heure s’écoula. Après le départ de tous les invités jusqu’au dernier, madame d’Aulnay, selon son habitude, monta à la chambre de sa cousine pour lui souhaiter une bonne nuit.

Antoinette paraissait singulièrement malade, mais elle était si calme et si tranquille que madame d’Aulnay, en entrant, n’en eût pas la moindre inquiétude.