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ENFANCE

plus âgée que lui, et qui l’avait toujours aimé, gâté, un peu élevé, fournit les fonds nécessaires pour l’impression des Poèmes Saturniens. Elle se maria assez tard à un sucrier du Nord, près de Douai, et ses couches difficiles eurent un dénouement fatal.

Verlaine a raconté ses sensations douloureuses durant sa course lamentable, sous la pluie et le vent glacé d’hiver, dans la morne campagne douaisienne, et son arrivée, souillé de boue et fumant de pluie, comme un chien mouillé, à la maison mortuaire, d’où il suivit, sous « l’averse sans fin, sa cousine, sa chère, à jamais regrettée, bonne, bien-aimée Élisa, portée par huit vieilles femmes, en long manteau noir, à l’immense capuchon comme monastique, rond et large, sur leur front de tristesse non affectée, car elle avait été si bienveillante aux pauvres !… ».

Bien qu’il eût plutôt entrevu que connu son fils Georges, bébé lors de la séparation, Verlaine éprouvait une affection vraie pour cet enfant. Ce n’était pas seulement un sentiment de convention, de convenance, une pose paternelle, c’était une véritable tendresse instinctive, animale, irraisonnée, impulsive.

Après le petit pensionnat de la rue Hélène, où les écoliers n’étaient que des bambins, on fit entrer Paul dans une grande pension de la rue Chaptal, l’Institution Landry, établissement important qui a duré jusqu’à ces dernières années. On y préparait aux cours du Lycée Bonaparte, du Collège Chaptal, au baccalauréat et aux Écoles spéciales. Le maître de l’établissement, M.Landry, était malade, et la maison se trouvait dirigée par son frère, M. Fortuné, grand mathématicien, surnommé irrespectueusement par les élèves le « Père Pointu ». Un excellent homme, très ferré sur les « x », les cosinus et