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ou six mois, selon que je saurai parler et entendre. Puis verrai sérieusement à gagner la vie en ce pays-ci, où probablement maman, j’espère, finira par se presque fixer.

Je n’ai aucune distraction, et n’en cherche pas. Lectures immenses, promenades avec élèves (pas en rang, tu sauras, rien du pionisme ici) à travers de magnifiques meadows [prairies] pleins de moutons, etc. Depuis huit jours c’est étonnant comme je me porte bien, moralement et physiquement.

J’ai semé dans mon passage à Londres les germes de relations qui me seront utiles un jour. Rien des réfugiés, of course [naturellement]. Revu quelques vieux débris. Lissagaray, m’a-t-on dit, est assez dans la panne. Vermersch est en Suisse, Andrieu a tout à fait fait son trou. C’est tout.

Tu m’enverras un tas de racontars. Il n’est pas vraisemblable que de nouveaux potins sur mon « mystérieux départ » n’aient pas eu lieu vers Montmartre, ou rue Fontaine [famille de sa femme]. S’ils pouvaient me voir en ma nouvelle incarnation, j’ose dire qu’ils seraient « astonish’d » [ébahis].

Prochainement plus de détails. Dessins, vers, etc… Pour l’instant, une recommandation : ne divulgue pas mon adresse jusqu’à nouvel ordre. Raisons très sérieuses. Tu remercieras bien Dierx de ses volumes. J’attends impatiemment lettre de toi, longue et substantielle.

Ton dévoué.

Mon adresse : M. P. Verlaine, at M. W. Andrews Stickney Grammar school, Boston, Lincolnshire.

Mon hameau se nomme Stickney, à 2 ou trois lieues de Boston, mais l’adresse doit être celle que je t’envoie. Silince !

P. Verlaine.


Il vécut ainsi apaisé, laborieux, régulier, dans cette pension familiale. Il m’écrivit relativement peu, durant cet internat. Il déclara à plusieurs reprises être complètement absorbé par ses occupations. Il laissait sommeiller la Muse. Ce furent des mois de recueillement, d’abstinence matérielle et spirituelle. Il resta une année et demie avec M. Andrews.

L’ennui, le désir de revoir sa mère lui firent quitter