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Je ne sais quoi et qui me souleva soudain, dit Verlaine, me jeta hors de mon lit, sans que je pusse prendre le temps de m’habiller, et me prosterna en larmes, en sanglots, aux pieds du crucifix et de l’image surérogatoire, évocatrice de la plus étrange, mais à mes yeux de la plus sublime dévotion des temps modernes de l’Église catholique.


Il fit derechef venir l’aumônier. Il était comme un nouveau Polyeucte. « Je fusse allé au martyre pour de bon !  » confesse-t-il. Il cria au digne ecclésiastique, un peu surpris de la vivacité du catéchumène et de l’excitation de sa foi improvisée, le cri de Pauline : « Je sais, je crois, je suis désabusé ! » et il réclama sur-le-champ l’absolution de ses péchés, après confession générale. Le prudent aumônier ajourna le déballage de la conscience, assez chargée, de ce pénitent si pressé. Verlaine, rendant compte de cette confession, qui eut lieu plus tard, et qui comprenait l’aveu de divers « torts sensuels », dit que le simple et vertueux prêtre l’aidait à se confesser en lui adressant des interrogations, et il ajoute :


Entre autres questions, ne me posa-t-il pas celle-ci, d’un ton calme et point étonnant, non plus qu’étonné :

— Vous n’avez jamais « été » avec les animaux ?

Après avoir répondu non ! — et ce non, sans stupéfaction de l’interrogation posée, — je reçus d’un front humble et contrit tout de même, après ma très véridique et consciencieuse, je vous assure, confession, la bénédiction, mais point encore l’absolution si convoitée. En attendant cette dernière, je repris, sur le conseil de mon directeur spirituel, mes travaux, lectures variées, et vers pieux principalement. De cette époque date à peu près tout Sagesse… (Mes Prisons, pp. 60-61.)


La conversion de Verlaine fut donc à la fois morale et poétique. Bien qu’il eût peu usé de la terminologie pieuse en ses premières poésies, et qu’il eût évité de faire rimer Dieu avec ciel bleu, il avait, dans le fond de