originale et inédite d’écrire en vers. À plusieurs reprises, dans ses lettres, il me parlait d’une innovation qu’il cherchait, d’un système qu’il voulait mettre en pratique, « système très musical, sans puérilité ». [Voir, plus haut, lettre de Londres.] L’isolement cellulaire lui permit sans doute de réfléchir plus profondément aux modifications qu’il se proposait d’apporter à sa métrique, comme à son style poétique, mais ne fut pas le point de départ de cette orientation littéraire nouvelle. La captivité, en le séparant des êtres et des choses, en même temps qu’elle le contraignait à se replier sur lui-même, à se concentrer, lui si facilement épars, si ouvert à toutes les émanations du dehors, lui inspira des réflexions imprévues, et lui dicta des résolutions inattendues. Il ressentait alors des sensations différentes de celles qu’il avait éprouvées, parmi les hommes, dans l’état de liberté. Rien de surprenant à ce qu’il ait formulé d’une façon neuve ces impressions d’un milieu nouveau.
Comme son tempérament de poète, son caractère d’homme fut modifié, mais moins définitivement, car sa conversion morale dura peu, au moins à l’état ardent et convaincu. Il dépouilla le vieil homme durant ces seize mois d’internement. C’est que le régime pénitentiaire changeait singulièrement ses habitudes, ses façons de vivre et d’agir. Prisonnier, il devenait forcément sobre. D’où répercussion physique et morale : l’abstinence modifia son état cérébral. Son excitation à peu près permanente diminuait avec la diète. L’alimentation mesurée, peu échauffante, et l’eau rougie apaisaient ses nervosités habituelles. Il reprenait peu à peu possession de lui-même. Il se dégrisait mentalement.
Un peu de honte et beaucoup de calme lui montait du