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Nous n’avons pas, à trente-trois ans de distance, à discuter la chose jugée. Verlaine a fait sa peine : sa prétendue victime, qui n’avait eu qu’une légère éraflure au poignet, est morte depuis. Le condamné a acquis l’amnistie de la gloire. On remarquera seulement que le texte de l’arrêt, reproduisant le jugement correctionnel, contient expressément la preuve que Verlaine a été condamné pour avoir, à Bruxelles, le 10 juillet 1873, « volontairement porté des coups et fait des blessures ayant entraîné une incapacité personnelle de travail à Arthur Rimbaud ». Rien de plus. Il est bien évident qu’avec l’hostilité que l’accusé avait rencontrée dans les autorités, avec le peu d’indulgence que lui témoignèrent les magistrats du Brabant, s’il y avait eu, dans le débat, la moindre preuve relative à des mœurs infâmes, si, comme la légende s’est perpétuée jusqu’à ce jour, Verlaine avait tiré le coup de revolver sur son ami dans une querelle passionnelle, à la suite d’une surexcitation de jalousie contre nature, les tribunaux belges n’eussent pas manqué de relever cette charge accablante, et d’appliquer à l’infamie de l’accusé toute la rigueur de considérants, ajoutant leur flétrissure à la sévérité de la condamnation.

On voit, par ces pièces authentiques, par tous les faits de la cause, que rien ne peut subsister de la calomnieuse aventure, qui a été colportée dans les milieux littéraires, reproduite dans de nombreux articles consacrés au poète Verlaine, et qui fait encore le fond de bien des appréciations malveillantes dans les conversations, où le nom et la personnalité de l’auteur des Romances sans paroles sont évoqués.

Le procès de Bruxelles établit nettement que Paul Verlaine a été condamné, avec une sévérité exceptionnelle, il est vrai, mais uniquement pour violences, coups