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après l’effort de celui-ci pour détourner le coup, partit vers le plancher, le canon du revolver étant abaissé.

Une stupeur profonde enveloppa les trois personnages de cette scène. Madame Verlaine mère entraîna son fils dans sa chambre. Il pleura, il exprima les regrets les plus vifs, et revenant vers Rimbaud, qui ne disait mot, il lui cria : « Prends le revolver et tue-moi ! » Madame Verlaine mère s’efforça de calmer les deux jeunes gens. Elle se mit à panser le poignet de Rimbaud, et, sur les instances de ce dernier, qui reprenait son idée fixe, elle lui remit 20 francs comme viatique, pour retourner chez sa mère à Charleville. On croyait, de part et d’autre, l’affaire terminée, et l’égratignure de Rimbaud, insignifiante, semblait déjà cicatrisée, sans suites possibles, ni médicales, ni judiciaires.

Le blessé insistant pour prendre le prochain train, et réintégrer immédiatement la maison maternelle, Verlaine voulut lui faire la conduite. Durant le parcours vers la gare, il était toujours en proie à une surexcitation vive.

Rimbaud crut, à un moment donné, qu’il fouillait dans sa poche pour de nouveau s’armer du revolver et faire feu. C’est du moins l’explication que le plaignant a donnée par la suite. Soit effet de la peur, soit par une sorte de machination diabolique, qui était bien dans son caractère, et afin de se débarrasser brutalement de Verlaine, qui l’obsédait, Rimbaud se mit à courir vers un agent de police, en criant : à l’assassin ! Verlaine le suivit, comme un fou, courant, gesticulant, criant, menaçant peut-être. Rimbaud le désigna au policier. Arrestation.

On alla s’expliquer au poste. On fouilla Verlaine. Le pistolet était une preuve, qui dès lors parut suffisante,