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bavards », les qualifiant de « divines » et de « cléricales », parce que savourées en compagnie du curé de l’endroit. Les promenades en ce pays pittoresque, les émanations forestières salubres, la quiétude ambiante, les bons repas et la compagnie aimable et franche de parents, de voisins, dont beaucoup avaient connu le capitaine Verlaine, lui rappelant les bonnes journées de vacances passées dans les mêmes parages, du temps où vivait, à Paliseul, la bonne tante Grandjean, rétablirent physiquement et moralement sa santé. Ce furent là encore pour lui quelques beaux jours, les derniers : le rayon de soleil trompeur avant la tempête.

Il m’informa ainsi de son nouveau séjour :


À Jéhonville (par Sedan, Bouillon, Paliseul),
Luxembourg Belge.


Mardi, 15 avril 1873.
Mon cher ami,

Je ne sais si tu es au courant de mon départ de Londres, mais qu’il te suffise de savoir que cette absence de la grande ville n’est que provisoire, car il ne m’est que trop prouvé que Paris, d’ici à longtemps, et Paris et la France, me sont dangereux.

Un essai de voyage par Newhaven et Dieppe m’a surabondamment prouvé cette triste vérité, et je n’ai dû qu’à un hasard providentiel, oserai-je dire, à une conversation en anglais de cuisine, entendue sur le bateau, une heure avant le départ, ladite conversation tenue par des hommes à redingues et à moustaches noires, de ne point gémir actuellement, dedans la belle France, dessus la paille, non moins humide que préventive, des cachots de la République que nous avons. Et pourquoi, grand Dieurje !

Or donc, Paris m’étant sinistre, je ne vois que Londres où faire mes orges, et j’étudie même ici l’anglais à tour de bras, ce qui m’est d’ailleurs une puissante diversion à tous ennuis conjugaux et aultres.