Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/316

Cette page a été validée par deux contributeurs.

La lettre dont je parle était complètement incompréhensible ; seulement, outre le nom d’Anna, déjà caractéristique, il y avait, follement appliqués, les noms d’Emma et de Charles. Il y avait cette expression allemande, que connaissaient ma femme et ma belle-mère : « dormir avec » ; l’écriture était visiblement déguisée, et trop pas assez retournée, pour être naturelle. Enfin, des fautes d’orthographe particulières ne me laissent aucun doute sur la provenance quelconque de cette mystification impudente. De son côté, Mme  Rimbaud, elle me l’a écrit, a reçu à plusieurs reprises des lettres anonymes contre son fils. J’attends une nouvelle lettre d’elle pour connaître leur provenance et leurs détails. Il y a, dans toutes ces circonstances, un évident filet dont les mailles doivent être et peuvent être rompues. C’est pourquoi je t’en fais part, afin que tu m’aides de toute ton amicale intuition à épousseter cette toile d’araignée.

Ci-joint trois exemplaires des vers à Bibi, imprimés hier dans l’Avenir. C’est bien vieux, déjà, tu dois les connaître [les Vaincus], mais c’est enfin d’ici. Il y en a deux pour Valade et Blémont. Si tu vois le premier, vitupère sur son silence, ainsi que le jeune Gavroche [Forain], Gros et Cabaner.

J’attends bien prochainement lettre tienne, et suis toujours tien.

P. Verlaine.

Amitiés chez toi. Félicitations sur ta traduction de Swinburne.


Dans une lettre postérieure d’un mois, Verlaine semble faire effort pour écarter de son esprit le tracas du procès. Il me reproche même de l’en entretenir exclusivement dans mes lettres. Il revient aux « Croquis Londoniens ».


Londres, 26 décembre 1872.
Mon cher ami,

J’ai, contre mon habitude, tardé à te répondre. N’en accuse que toi. Pourquoi ne me parler que de ce vilain procès, aussi ? J’admets tes préoccupations à mon égard, pour son