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voués, et pouvaient lui faire envisager la séparation préférable, même désirable. Mais Verlaine était bon, aimant, et c’était comme un souffrant qu’il fallait le traiter. On a des ménagements pour les malades. On leur passe bien des écarts, et leurs boutades, leurs mauvais moments, sont oubliés ; leurs violences même sont pardonnées. La guérison était possible, mais il était indispensable que la jeune épouse, qu’il adorait, se fît hospitalière, garde-malade, sœur de charité, plus que cela, chirurgienne de l’âme ulcérée de son mari, et geôlière de sa chair en révolte. Elle ne put ou ne voulut entreprendre cette médication sublime.

Verlaine a lui-même douloureusement constaté le refus de soins dont il fut l’objet, quand il soupira cette plainte douloureuse et touchante des Romances sans paroles :


Vous n’avez pas eu toute patience,
Cela se comprend, par malheur, de reste ;
Vous êtes si jeune ! et l’insouciance,
C’est le lot amer de l’âge céleste !

Vous n’avez pas eu toute la douceur.
Cela, par malheur, d’ailleurs se comprend ;
Vous êtes si jeune, ô ma froide sœur,
Que votre cœur doit être indifférent !

Aussi, me voici plein de pardons chastes,
Non, certes, joyeux ! mais très calme, en somme,
Bien que je déplore, en ces mois néfastes,
D’être, grâce à vous, le moins heureux homme…


Une séparation de fait eut donc lieu. Elle ne devait pas tarder à être transformée en séparation judiciaire.

Paul Verlaine se décida à faire des voyages dans le