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renvoyer à Charleville, les communications étant coupées par les Prussiens.

Tel fut le premier contact de Rimbaud avec Paris. Il s’évada une seconde fois de chez ses parents et se rendit à Charleroi, avec le désir de faire partie de la rédaction d’un journal de cette ville, mais il ne fut pas accepté. Il faut dire que son air d’enfant malingre et vicieux ne prévenait guère en sa faveur, et que le rédacteur en chef du journal ne pouvait s’imaginer trouver un collaborateur sérieux dans ce vagabond inquiétant. Il revint donc à Charleville, dans la maison maternelle, et y resta tranquille jusqu’à la fin d’octobre 1870. Pendant cette période, il composa plusieurs de ses poèmes, dont les Effarés, le Cabaret vert. Arthur Rimbaud correspondait avec un ami, qui fut aussi celui de Verlaine, M. Delahaye. Bientôt, il eut derechef le désir de revenir à Paris. Il savait que les Allemands entouraient la capitale d’un cercle de fer, et la crainte de ne pouvoir le franchir le retint quelque temps encore dans la ville natale. Il pestait contre la guerre, et surtout contre la défense des Parisiens, contrariant ses projets. Il demandait avidement des nouvelles, s’informant chaque jour, à l’Hôtel de Ville, ou dans les cafés, des progrès de l’envahissement.

Il déblatérait contre les longueurs du siège, et trouvait la résistance absurde et inutile. Il disait que, dans la cité assiégée, on ne pensait qu’à manger, et qu’il n’y avait rien à faire pour la poésie. « Paris n’est plus qu’un estomac ! » affirmait-il.

Ce gamin talentueux fit preuve d’une force de résistance et d’une confiance orgueilleuse extraordinaires. Il adressa, avant de quitter Charleville, à son ancien maître de Douai, M. Isambard, celui qui l’avait rapatrié