eût pu être moins tardive), — Sainte-Pélagie étant loin et mes instants étant comptés.
Cette irritation ne pouvait durer. Je me hâtai d’envoyer une bonne lettre, datée de la geôle, invitant Verlaine à venir, le dimanche suivant, partager notre ordinaire de prisonniers, que renforçaient d’abondantes victuailles venues du dehors et arrosées de pas mal de liquides. Je lui expliquai que j’avais dû, avant de le prier de me visiter, m’informer au greffe des formalités. On avait, au pavillon dit des Princes, la faveur de recevoir toute la journée des visites dans sa chambre, mais il fallait consigner auparavant le nom du visiteur sur une liste remise à la direction et soumise au visa du préfet de police. Cette formalité exigeait deux ou trois jours. De là, cet avis laconique de mon écrou, dont il s’était montré vexé.
Il ne vint pas le dimanche suivant, et s’en excusa par la lettre suivante, d’un ton bien différent du billet rageur qu’on a vu plus haut :
Si je ne me suis pas rendu, aujourd’hui dimanche, à ton aimable invitation, n’en accuse que l’apparition du livre ci-joint qui a nécessité mille démarches, et m’empêche d’aller à Pélago, outre que ma concierge ne m’a remis ta lettre que ce matin à 10 heures.
Mais compte sur moi dimanche prochain, dès la première heure, tu sais si j’ai du temps à moi dans la semaine !
Je l’envoie les Fêtes galantes, pas pour des prunes ? — (service de presse !) Donc un article écœurant d’éloges ou la mort ! Zut pour Woinez ! J’enverrai peut-être à Barbum. [Charles Woinez, chargé de la critique littéraire au Nain Jaune. — Barbum, Barbey d’Aurevilly.]