Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.
122
PAUL VERLAINE

vieille amitié me pardonnera, j’en suis sûr, mon absence forcée, et comprendra toute la part que je prends à ton affreux malheur.

Agrée bien et fais agréer à Laure [ma sœur] l’expression des sentiments douloureux dont m’a frappé la mort de ton excellente mère. Écris-moi, je te prie, soit pour me dire de te venir voir tel jour, soit pour me prévenir du jour où tu viendrais me voir.

À bientôt, ton ami tout dévoué.

P. Verlaine.
14, rue Nicolet, Paris-Montmartre.


Quel était le motif réel de cette absence ? Mme  Verlaine mère m’en fit-elle part ? Étais-je trop accablé par le deuil pour avoir retenu l’explication ? Toujours est-il que je n’ai gardé nul souvenir de la raison donnée, s’il y en eut une. Mme  Verlaine mère dut plutôt se montrer réservée. Je suppose qu’il s’agissait de quelque querelle de ménage et de scènes avec les beaux-parents, ayant retenu Verlaine rue Nicolet.

Mais nous parlerons plus loin des crises du jeune ménage et du triste épilogue de la Bonne Chanson. Dans ce chapitre je n’examine que la situation de Verlaine employé.

Sa résolution de ne pas retourner à son bureau avait été prise étourdiment, sans consulter, sans avoir été aux renseignements, sans une démarche auprès de ses chefs. Il avait accueilli très facilement des propos en l’air. Il fut impressionné sans doute par les bavardages de gens affirmant, que d’anciens collègues le feraient arrêter, s’il avait l’audace de reparaître à la Ville. Cette funeste et irréfléchie décision eut une influence décisive et désastreuse sur sa destinée. De cette période d’oisiveté date la seconde existence de Verlaine, la malheureuse, la dévoyée. Il n’est pas encore le bohème et le