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PAUL VERLAINE

treur. Verlaine n’a jamais eu le titre, comme on l’a dit, de directeur ni même de chef du bureau de la presse. On n’eût pas manqué, si le fait avait été exact, de l’inculper pour usurpation de fonction.

Verlaine ne se mêla à aucune des affaires politiques ou militaires de la Commune. Il faisait des vers au bruit de la canonnade du Point-du-Jour, imitant Gœthe, qui, au dire de Théophile Gautier, pendant les guerres de l’Empire, à Weimar, s’isolait des événements, et, sourd à la brutalité du canon, d’Hafiz effeuillait les roses, et composait le Divan oriental. Il n’eut même pas la curiosité de descendre dans la rue, en spectateur, durant les terribles et grandioses journées de la prise de Paris, pour contempler, comme disait Proudhon, en juin 1848, arrêté et interrogé à une barricade de la rue du Temple, la sublime horreur de la guerre civile.

Sa femme, qui avait réintégré le domicile conjugal après sa première retraite, dès le lundi matin 22 mai, aussitôt la nouvelle répandue que les Versaillais avaient franchi la porte d’Auteuil, et qu’on fusillait déjà du côté des Champs-Élysées, avait couru voir ses parents, rue Nicolet, à Montmartre. Elle avait confié son mari et la maison à une petite bonne, alerte et proprette. Mme Verlaine avait le sentiment filial plus développé que l’anxiété conjugale, et même que la jalousie.

Comme Verlaine a rapporté, dans ses Confessions, mais d’une façon qui n’est pas tout à fait exacte, notre rencontre durant la sinistre journée du mercredi 24 mai 1871, je vais rétablir certains points de son récit. C’est un fragment d’histoire vécue.

Je me trouvais, avec mon ami Émile Richard, depuis mort président du Conseil municipal de Paris, aux environs de l’Hôtel de Ville en flammes, le mercredi 24 mai