Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/115

Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
VERLAINE EMPLOYÉ

mitifs inutiles. Quelques-uns vaguèrent dans Versailles, jusqu’à l’entrée des troupes ; le plus grand nombre revint, sans bruit, à Paris. Ces bureaucrates inemployés, bénéficiant d’un congé extraordinaire, attendirent la suite des événements, préoccupés seulement de savoir si l’on paierait ces deux mois de vacances non réglementaires. Ils reprirent tous leur place, sans observation ni blâme, après la chute de la Commune.

Verlaine eut une attitude différente, mais nullement délictueuse. L’ennui de quitter Paris, pour camper dans une ville encombrée de militaires et de fonctionnaires, et quelques amitiés parmi les chefs du mouvement, notamment celle de Raoul Rigault, un camarade très antérieur à la politique, d’Andrieu, le fils d’un répétiteur de latin que j’avais eu, de Léo Meillet, le décidèrent à rester. Sa femme, d’ailleurs, ne voulait pas laisser ses parents, et il aurait fallu emmener Mme Verlaine mère. Tous ces liens combinés l’attachèrent à Paris. L’Hôtel-de-Ville n’avait pas bougé. Il y retourna avec la docilité de l’habitude. Il subissait l’attraction machinale de l’employé, qui va à son bureau avec une régularité automatique.

Il revint donc s’asseoir, sur sa chaise coutumière, dans la pièce où il avait sa place marquée. Il fonctionnait, comme si rien ne s’était accompli, dans le va-et-vient régulier du ressort administratif. Il était dans la logique bureaucratique. Un employé ne doit connaître que le local où il a son siège assigné, son écritoire, ses registres. Au symbolique rond-de-cuir n’est-il pas attaché, comme le serf à la glèbe de jadis ? Il est une pièce d’une machine compliquée. Tant que la machine est debout, il doit remplir sa fonction de pièce mécanique. Les événements politiques ne sauraient avoir aucune influence