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VERLAINE EMPLOYÉ

tons verts surmontant son bureau, déployait un journal du matin, ou bien crayonnait quelques silhouettes aperçues dans le parcours des Batignolles au bâtiment municipal, ou encore il rimait lentement un quatrain ou ébauchait un sonnet. Dès midi, il s’évadait du bureau, nu-tête, laissant accroché à la patère son chapeau, répondant de sa présence, en cas de visite du sous-chef. Il n’était surveillé que par un commis principal, nommé Guy, brave homme, besogneux et laborieux, préoccupé surtout de récolter des travaux supplémentaires, et satisfait d’avoir un collègue qui n’en recherchait point. Verlaine avait pour tâche de mandater les traitements des desservants de Paris et ceux des curés de la banlieue.

Hors du bureau, de son pied alors léger, Verlaine se rendait au café du Gaz, rue de Rivoli. Là, se réunissait, tous les jours, nombreuse et poétique compagnie. L’Hôtel de Ville, sous le baron Haussmann, fut fort hospitalier pour les gens de lettres. On sait que Rochefort avait passé par ces bureaux, et y avait travaillé dans la mesure de Verlaine. Georges Lafenestre, Armand Renaud, Léon Valade, Albert Mérat, tous poètes destinés à une certaine renommée littéraire et à une carrière administrative prolongée, étaient, parmi les employés municipaux, fidèles habitués du café du Gaz. Par la suite, j’y déjeunai parfois, en venant du Palais. Là, eurent lieu de longues parlottes de poètes amis, de jeunes débutants de lettres, de maîtres sur invitations venus à ce café. À côté d’entrepreneurs, ayant déjeuné à la Belle-Gabrielle, et, en prenant le café, parlant d’adjudications et discutant des rabais, on entendait s’élever de bruyantes et contradictoires discussions sur la rime riche, sur l’e muet, sur la consonne d’appui, sur la césure libre, sur le