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pas non plus à la possibilité de défendre Paris avec les éléments à sa disposition. Il ne reconnaissait pas à la garde nationale, hâtivement composée de pacifiques civils habillés en soldats et imprudemment transportés en face de militaires professionnels, la capacité de se battre et le pouvoir « le vaincre. Trochu pouvait à la rigueur être excusé de ne pas oser livrer bataille avec des troupes qu’il jugeait incapables de tenir devant un ennemi supérieur. Il ne voulait pas risquer le combat, puisqu’il était persuadé qu’il ne disposait pas de combattants. Mais Cluseret devait-il avoir cette défiance de la garde nationale ? Alors était-il criminel ou fou d’avoir accepté le commandement au 5 avril ? Il ne comprit pas qu’il ne fallait point imiter l’inaction de Trochu, et qu’il devait, tous les jours, mener ses troupes au feu et en grand nombre, les aguerrir, harceler l’ennemi, gagner du terrain, et reculer le plus que cela serait possible l’heure fatale où, écrasé par la force numérique, épuisé par les pertes, il lui deviendrait interdit de continuer la lutte au dehors des murs. On avait des forts, mais l’un d’eux, Issy ou Vanves, finirait par être démantelé, par devenir intenable. Ce général en chef devait donc prévoir le moment où il lui faudrait circonscrire la résistance, d’abord aux remparts, ensuite dans l’intérieur même de la ville. Ce fut aussi sa pensée, son plan. Et cependant, bien qu’il ait cru que cette résistance dans la cité était la seule possible, la seule efficace, il ne fit rien pour la préparer, pour la rendre terrible, invincible. Il avait assisté à la sortie malheureuse du 3 avril. Il avait blâmé la conduite et constaté les défauts trop évidents de cette opération, la faiblesse du commandement et aussi l’insuffisance de la préparation. Mais, de ce que cette sortie n’avait pas réussi, de ce qu’elle avait été tentée avec inexpérience, sans qu’on eût usé de toutes les ressources que Paris avait