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importun critique, M. Thiers se souvint à propos que ce même Vinoy passait pour bonapartiste, qu’il était un général du Deux-Décembre, et qu’il avait signé la capitulation de Paris. Sa disgrâce fut décidée. Mais par qui le remplacer ? M. Thiers songea un moment à Ducrot. Ce guerrier était écrasé sous le poids de sa jactance passée. Il ne s’était pas relevé de sa chute à Champigny. Pourquoi était-il revenu, malgré son fier serment, bien portant et vaincu ? L’opinion lui eût pardonné d’être rentré battu, s’il n’avait promis, à défaut de la victoire, de trouver la mort. Et puis, il passait pour très autoritaire, très cassant, il voudrait sans doute, lui aussi, se mêler des opérations militaires et oserait contrecarrer le Napoléon en redingote noisette. Ducrot serait un autre Vinoy, plus gênant peut-être. Il fallait chercher ailleurs.

Mac-Mahon, après six mois de captivité douce à Wiesbaden, ancienne station thermale renommée, était rentré à Paris, dans son hôtel de la rue de Bellechasse. Il passa la journée du 17 mars, chez lui, les pieds dans ses pantoufles, ne se doutant nullement des événements qui se préparaient, se demandant seulement ce qu’il devait faire. Le 18 mars, entendant battre le rappel, il ne bougea point. Il envoya discrètement un mot au général Le Flô, ministre de la guerre, pour l’informer qu’il était à Paris, et qu’il se mettait à la disposition du gouvernement. Puis, ne soupçonnant pas la gravité des événements qui se succédaient, estimant qu’il n’avait pour le moment aucun rôle à jouer, il se disposa à se mettre au lit. La duchesse de Magenta était déjà couchée, quand un message surprit le maréchal en toilette de nuit. C’était la réponse du ministre de la guerre. Le général Le Flô l’engageait à venir sans retard à Versailles le retrouver. Il lui annonçait que le gouvernement avait quitté Paris, et il lui faisait part de l’exécution des généraux