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devenir l’hôtesse familière. Elle serait la compagne prévue, et, dans la ville bombardée, comme aux époques sinistres où le choléra dévastait les faubourgs, on ferait à peine attention au tombereau passant, chargé de cadavres ramassés aux avant-postes. Dans son bref et énergique discours au Père-Lachaise, devant les cercueils alignés, Charles Delescluze sembla prononcer le Requiem laïque de la Commune, et aussi son propre De Profundis.

Les bières descendues dans les fosses préparées, les délégations défilèrent, jetant au passage les touffes d’immortelles rouges. Puis, ayant retenu la promesse faite au nom de tous par l’orateur de la Commune, que les morts ne seraient pas oubliés, que leur exemple vaillant demeurerait présent à la pensée de tous, et que certainement ils seraient vengés, les gardes nationaux, poussèrent, comme un appel aux armes, un seul cri : « Vive la Commune l » Alors s’éloignant des sépultures, redescendant les pentes de la nécropole, regagnant la ville en rumeur que la vie emplissait et d’où montaient des grondements confus, ils se dirent l’un à l’autre :

— « À présent, allons combattre ! »

Et l’immense cimetière verdoyant, où les oiseaux parmi les tombes célébraient la vie et le renouveau, redevint silencieux, paisible, troublé seulement par le son mat de la terre que remuaient les pelles des fossoyeurs disposant des fosses neuves.

PENSIONS AUX VEUVES ET AUX BLESSÉS

L’effet moral produit sur la garde nationale par cette solennelle procession funèbre fut autre que celui sur lequel avaient dû compter les promoteurs de la cérémonie. Le nombre des combattants diminua sensiblement aux appels