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impérial. Les élections de 1869 propageaient la fièvre dans tous les esprits. Flourens se jeta au premier rang dans la mêlée. Il donna à la Marseillaise de Rochefort des articles, un peu faibles au point de vue journalistique, mais vibrants d’ardeur républicaine. Il y traitait les questions relatives à l’armée, principalement dans ses rapports avec les citoyens. Il fut condamné pour ces écrits à trois mois de prison. À peine en liberté, il se rencontrait avec Paul de Cassagnac dans un duel acharné, où il fut grièvement blessé. Le genre d’articles qu’il publiait dans la Marseillaise le mettait en relations avec des sous-officiers mécontents, qui lui fournissaient des renseignements, surtout des plaintes sur leurs chefs et sur ce qui se passait dans leurs régiments. Ces relations donnèrent l’idée à la police impériale, tors du complot de Blois, d’imputer à Flourens un projet de conspiration militaire. Des sous-officiers embauchés par le chef de la police politique, Lagrange, les nommés Beaury, Auron, Fayolle, Verdier, et avec eux un traître, qui avait été son compagnon d’armes eu Crète, Ballot, abusèrent de la confiance, de la crédulité aussi, du franc et enthousiaste révolutionnaire. Il put heureusement gagner à temps l’Angleterre et échappa au piège qui lui était tendu.

Toujours disposé à payer de sa personne, le jour mémorable des obsèques de Victor Noir, il avait conseillé la marche sur Paris. C’était une témérité grande et une aventure redoutable. Mais peut-être l’émeute se fût-elle transformée en révolution, et une collision avec la troupe, peu sûre, eût-elle entrainé toutes les forces républicaines de Paris concentrées ce jour-là, insuffisamment armées il est vrai ? La motion était d’un brave, sinon d’un sage. Si on ne l’eût retenu et entrainé presque de force vers le cimetière de Neuilly, Flourens était capable de se diriger, isolé, sans regarder s’il était suivi, sur Paris et de s’y faire tuer.