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bouffées de fumées belliqueuses, de cris de révolte et de guerre, des appels à l’aide et à la liberté, lui vinrent de l’Hellade en insurrection et l’étourdirent, le grisèrent. On se battait en Crète. Râlant sous le genou des Turcs, se souvenant des temps assez récents où la Grèce pareillement foulée, invoquait et recevait le secours de l’Occident, où lord Byron mourait à Missolonghi, où Victor Hugo célébrait Canaris, grand brûleur de vaisseaux musulmans, les Crétois accablés imploraient la présence, le renom, le prestige et les armes de volontaires européens. Flourens troqua aussitôt la plume du lettré, les livres du savant, la robe du professeur, contre la monture, les pistolets et le sabre du partisan. Il partit en Crète, chevalier errant de la liberté, défenseur de l’opprimé. Prêt à braver tous les périls pour la délivrance d’un peuple faible écrasé, il se vouait à l’affranchissement d’une race sympathique dont la servitude a duré jusqu’à nos jours. Il endossa dès lors le costume pittoresque, sous lequel nous l’avons aperçu à son retour en France : la veste bleue soutachée, le pantalon bouffant, la calotte rouge à gland tombant sur la nuque, le sabre courbe aux côtés et les pistolets damasquinés passés dans la ceinture large. Il avait grand air ainsi accoutré. Cette expédition eut une influence décisive sur la destinée de Flourens. Elle laissa dans son âme fougueuse une impression ineffaçable. Elle le prédisposa aux aventures nouvelles. Il se comporta vaillamment parmi les Crétois, et quand il dut quitter l’ile, en révolte mais bientôt comprimée, il revint par l’Italie. Il écrivit alors dans des journaux de ce pays le récit de sa campagne. Des critiques adressées au gouvernement d’Italie le firent condamner par les tribunaux royaux à six mois d’emprisonnement. Libéré des prisons italiennes, il revint en France. C’était l’époque frémissante de l’assaut donné au régime