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même s’engagèrent jusqu’au pont, montèrent dans Bougival, et le drapeau rouge fut un instant arboré sur le clocher de ce village. On n’était plus qu’à six kilomètres de Versailles, et aucune redoute ne pouvait gêner le passage, aucun retranchement ne barrait la route. Si toute l’armée avait pu suivre l’avant-garde, Versailles, par le Chesnay, se trouvait sérieusement menacé.

La nouvelle s’était répandue à Versailles de l’approche des fédérés et l’alarme était vive.

Plusieurs députés, a dit M. Léonce Dupont, autant de gauche que de droite, se tenaient prêts à tirer leurs grègues devant l’invasion. Ils avaient fait leurs malles et s’étaient pourvus de moyens de transport. Le danger passé, on les voyait arriver un à un dans la galerie des Tombeaux, un peu rassurés, mais blêmes encore de la peur qu’ils avaient eue.

(Léonce Dupont. — Souvenirs de Versailles, p. 50. — Paris, 1887, Dentu, éd.)

À Versailles on avait donc été surpris. Les généraux, satisfaits par l’escarmouche du dimanche, et la réussite de l’attaque du rond-point de Courbevoie, qu’ils avaient préparées depuis deux jours, ne croyaient pas que les parisiens pussent recommencer si tôt une démonstration. Ils n’avaient pas songé à mettre Versailles à l’abri d’un coup de main. Aussi leur victoire, du côté nord-ouest, fut-elle due uniquement à quelques obus tirés au petit bonheur par le Mont-Valérien, et à la panique qui se produisit parmi les combattants peu aguerris, mal disposés à la discipline, incapables de tenir solidement en rase campagne.

Ces hommes, — nous avons dépeint le caractère de cohue et non pas d’armée du corps de Bergeret, — s’étaient concentrés au hasard, avaient couru au combat avec élan, mais avec irréflexion, et sans paraître préparés à rencontrer une