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qui avaient rôdé dans Paris, les internés de l’armistice, désœuvrés et désarmés, attendant le licenciement durant le triste intervalle entre la capitulation et les événements de la Butte. Donc, les troupes de Versailles tiendraient et ne tarderaient pas à s’aguerrir. Cette sortie du 2 avril avait été une épreuve décisive. En prenant contact avec ces parisiens qui les intimidaient, dont la réputation de casse-cous les impressionnait, les soldats s’étaient montrés surpris par la facile victoire. Ils avaient perdu de l’appréhension et gagné de l’aplomb. Ce succès d’escarmouche, dont leurs chefs exagéraient à dessein l’importance, donnait au soldat, la veille peu rassuré, sinon la certitude de vaincre l’insurrection, du moins la possibilité de lui tenir tête. Du côté de la Commune, surtout parmi les chefs et les raisonneurs, c’était au contraire une constatation dépressive. Le peu de solidité des bataillons fédérés en rase campagne, l’absence d’organisation, le manque de prévoyance des généraux, peut-être le défaut de capacités, avec l’insuffisance des ressources préparées et utilisables immédiatement, tout cela apparaissait maintenant visible, inquiétant. La bravoure des hommes était certaine, mais la valeur du commandement semblait douteuse. Des récriminations et des reproches s’élevèrent au sein de la Commission exécutive, et l’on décida de confier le commandement supérieur à un soldat de métier, au général Cluseret.

CLUSERET DÉLÉGUÉ À LA GUERRE

Dans la journée, en apprenant successivement [la prise d’armes, l’insuccès du matin et les causes de désordre et d’échec, en constatant l’imprévoyance et l’insuffisance du commandement, la Commission avait fait appeler le général américain Cluseret et lui avait offert la délégation à la