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vota alors la dissolution du conseil municipal et convoqua les électeurs pour le 3 avril. C’était trop tard. Déjà les troupes étaient en marche. On avertit ce qui restait de membres présents que les soldats d’Espivent n’allaient pas tarder à paraître. Ils répondirent avec un aplomb aussi marseillais que lacédémonien : « Qu’ils y viennent, té !… »

À cinq heures du matin, le 4 avril, Espivent, qui venait de recevoir de Versailles la nouvelle de la déroute des fedérés à Rueil, donna le signal de l’attaque. Il fut bientôt maître de la ville. La préfecture seulement résista. Là, fortement retranchés, les gardes nationaux attendirent, décidés à lutter jusqu’au bout. Le combat fut assez vif, mais bref. Des hauteurs de Notre-Dame de la Garde, l’artillerie bombarda la préfecture et rendit la place intenable. À trois heures, ses défenseurs hissèrent le drapeau blanc. Espivent exigea que les combattants se rendissent à discrétion, et il continua le bombardement. Les combattants évacuèrent la place, et les marins de la Couronne prirent avec élan l’édifice vide « à l’abordage », dit superbement M. Thiers à la tribune : « Il y a huit jours, à Marseille, il fallait prendre l’hôtel de La préfecture, la hache d’abordage à la main. » (M. Thiers, séance du 8 avril.) Il n’y eut pas de combat à la hache, et même pas de combat du tout, dans la préfecture ouverte. Les troupes eurent en tout 30 morts et 50 bessés, et les insurgés 150 environ. Le général Espivent fit une entrée qu’il qualifia lui-même de triomphale dans une dépêche adressée à M. Thiers. Pour affirmer son facile triomphe, il lança le 5 avril une proclamation aux marseillais, dans laquelle il disait :

La préfecture, dernier foyer de la résistance, a été occupée le soir même de l’attaque, par mes braves auxiliaires de la marine, au moment où je suspendais le feu de l’artillerie placée à Notre-Dame de la Garde. Il me reste un devoir à remplir, c’est de pré-