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Il était évident qu’un homme ayant toute la force armée de Paris à sa disposition, et de plus étant l’élu de tout le peuple parisien, aurait un pouvoir bien supérieur à celui de l’élu de délégués des bataillons. La force matérielle et morale dont disposerait ce général nommé par toute la population le ferait maître de Paris, l’arbitre de ses destinées. Il dominerait isolément chaque membre, et même, dans son ensemble, le conseil communal dont on préparait l’élection par des scrutins locaux.

Un des officiers voulant appuyer la motion de Protot s’é cria : « Le Comité Central exige le vote universel. » Protot avec franchise répondit aussitôt :

Je dois vous dire, Messieurs, que je suis ici comme chef de bataillon, et non comme membre du Comité Central. Mes collègues ne m’ont donné ni pouvoir ni instructions pour rien décider. Veuillez donc ne pas tenir compte de ma qualité de membre du Comité Central. Je ne puis m’engager à rien, ni engager le Comité. Décidez comme vous le croirez bon.

Cette loyale déclaration réfute donc l’assertion, produite par la suite, que « le Comité Central avait pris dans cette réunion, par la bouche de son délégué Protot, des engagements qu’il n’a pas tenus ».

Les maires devaient bien se douter qu’il ne s’agissait là que de préliminaires en vue d’un accord, et que ces échanges de vues devaient, si les termes en étaient acceptés de part et d’autre, recevoir la ratification du pouvoir de fait existant à l’Hôtel-de-Ville. Cette condition était sous-entendue, d’autant plus que l’un des négociateurs déclarait loyalement qu’il n’avait pas mandat d’engager le Comité Central.

Schœlcher mit donc aux voix les deux propositions : à la presque unanimité, la réunion se prononça pour l’élection du commandant supérieur par le suffrage universel.

À tout prix, avait dit sincèrement M. Méline, il faut évi-