L’Assemblée émigrait-elle, comme on l’a envisagé ? Par l’interception des trains, par la suppression des recettes, elle devenait isolée, prisonnière, et la province l’abandonnait, surtout si le Comité Central, conservant ses pouvoirs insurrectionnels, convoquait, comme en février 48, non pas une assemblée parisienne, mais une assemblée nationale, à laquelle la France entière se fût ralliée, car pour tout le monde, sauf pour les entrepreneurs de restauration monarchique, l’Assemblée avait épuisé son mandat, la paix votée.
En procédant à l’élection d’une Assemblée Communale, en installant les élus, en prenant possession d’une salle de délibération, en se préparant à entendre et à prononcer des discours, les hommes de 71 crurent agir sagement et régulièrement. Ils eurent la manie de la légalisation et subirent la séduction des organisations parlementaires. Ils obéissaient à l’atavisme. Ils se soumettaient avec complaisance à la loi de limitation. Ils se préoccupaient de recommencer l’histoire de la Révolution. Ces histoires-là ne se recommencent guère et ne supportent pas de parodies. Quand la Convention et la Commune de 93 discutaient, entendaient de belles, pompeuses et longues harangues, des discours pour la plupart écrits et répétés devant la glace, quand les Comités entassaient les décrets et vaquaient à de multiples, diverses et surprenantes besognes administratives, quand ces actives assemblées accomplissaient un travail législatif considérable, elles n’avaient pas à se préoccuper de leur salut immédiat. Des comités militaires spéciaux s’occupaient à organiser la victoire, la frontière était reculée par les baïonnettes des volontaires de l’an II, les rois tremblaient chez eux, et leurs trônes remuaient, ébranlés par les pas de plus en plus rapprochés des quatorze armées républicaines, invincibles. Les princes de la coalition ne songeaient plus à corriger les Parisiens, ni à leur donner des lois.