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dre calmes et circonspectes tout à coup. Ce serait là une invraisemblance physiologique et morale. Ainsi, ces exaltés, ces « guerre à outrance », comme les nommaient ironiquement les militaires, se seraient tenus cois et les bras croisés, en vue d’une insurrection problématique, dont personne n’aurait pu dire ni l’objet, ni la date !

Le mouvement qui éclata quelques jours après, le 22 janvier, prouve bien que rien n’était prévu, ni combiné, dans les milieux populaires, à l’époque du combat de Buzenval. Ce fut l’échec du 19 janvier et la capitulation, qui furent la cause de cette tentative d’insurrection. Le peu d’adhésions qu’elle rencontra, le petit nombre de gardas nationaux qui y prirent part prouvent que les combattants de Buzenval ne s’étaient pas ménagés ni réserves en vue d’une guerre civile, que personne ne pouvait prévoir, ni au 22 janvier, ni même le matin du Dix-Huit mars. Il est certain que, sans le coup de force de Thiers, voulant enlever les canons de Montmartre et ensuite désarmer la garde nationale, l’insurrection, au 18 mars, n’eût pas éclaté, et n’aurait peut-être même jamais eu lieu.

L’imputation absurde tombe donc devant les faits. Il y a cependant un point à approfondir et une explication à donner sur cette observation, résultant de la statistique des morts et blessés du 19 janvier : les bataillons des faubourgs, ceux réputés comme ayant fourni par la suite les plus intrépides soldats à la Commune, n’ont pas éprouvé de pertes sensibles, et l’on ne signale pas, sauf quelques exceptions, leur présence sur les divers points périlleux, ceux où l’action fut la plus vive, où le feu fut le plus meurtrier. Ainsi, au mur de Longboyau, au parc de Buzenval, à la Bergerie, dans les premières maisons de Garches, au parc Pozzo di Borgo à Saint-Cloud et dans les ravins de Cucufa, comme sur les pentes de la Tuilerie et de Montretout, voici les trou-