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plus populaire, aux tyrannies seigneuriales, royales ou épiscopales, sous lesquelles souffraient les peuples. La Commune fut l’avènement, le triomphe de la bourgeoisie, des gens des bonnes villes.

Ce ne fut pas une révolution exclusivement faite au profit du Tiers-État, bien que cet ordre ait recueilli tous les avantages de l’idée communaliste. Ce mouvement des communes, aux xiie siècle et xiiie siècles, fut d’abord exclusivement urbain. Il prit un caractère municipal et laïque, autant que cette dernière qualification peut être employée, quand il s’agit d’une époque où les insurgés étaient tous croyants et pratiquants, où la fréquentation des sacrements et le respect des commandements de l’Église dominaient les consciences et dirigeaient les mœurs. Les « Communards » du passé étaient les adversaires des puissances ecclésiastiques, mais non des puissances célestes. Le dogme n’était pas discuté, en dehors de la casuistique et des théologiens. L’incrédulité eût été une expression vide de sens, confondue avec l’influence diabolique. Les plus violents révolutionnaires de ces temps religieux, les bouchers de Paris, compagnons de Caboche, étaient tous de fervents catholiques et de pieux paroissiens. Les habitants des bonnes villes avaient voulu se soustraire à la domination et aux exactions des seigneurs, surtout des seigneurs évêques, ils n’entendaient nullement combattre la foi et s’émanciper de la tutelle spirituelle. Leur association et leur révolte eurent pour conséquence, non pas un groupement de libres-penseurs, espèce inexistante alors, insoupçonnée même, mais l’entrée en scène d’une classe nouvelle, inconnue du monde ancien comme de la féodalité germanique, qui s’était lentement formée au milieu de la désagrégation de l’empire romain et des bouleversements produits par l’invasion barbare. La victoire de ce nouvel ordre social fut la récompense de sou énergie.