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est insensée. Les barricades qui se font tout autour d’ici ne sont pas sérieuses. »

Nous avions pu, en effet, faire constater par nos gens que c’étaient des barricades tout à fait improvisées.

Sur ces entrefaites revint l’officier qui s’était rendu auprès du général Vinoy. Il reportait l’ordre écrit et formel de tout évacuer.

Je tentai un dernier effort et j’écrivis au ministre de l’Intérieur :

« 18 mars 1871, 9 h. 50 m. du soir.
« Maire de Paris à Intérieur.

« Je reçois l’ordre du général Vinoy d’évacuer l’Hôtel-de-Ville. « Pouvez-vous m’envoyer des forces ? Répondez immédiatement. »

Vingt minutes après, il me répond :

« 18 mars 1871, 9 h. 50 du soir.

« Intérieur à Maire de Paris. Votre dépêche a été transmise au gouvernement avec invitation de vous répondre directement et immédiatement, et ne puis prendre sur moi de donner l’ordre de désobéir à Vinoy. »

Mais comme aucune nouvelle n’arrivait, le général Derroja me dit : « C’est tout ce que je puis faire. J’ai épuisé les dernières limites de mon droit. Je vais faire évacuer l’Hôtel-de-Ville. »

À 9 h. 55 m. je télégraphiai une dernière dépêche au ministre de l’Intérieur :

« 18 mars 1871, 9 h. 55 m. soir.

« Maire de Paris à Intérieur.

« Les troupes ont évacué l’Hôtel-de-Ville. Tous les gens de service sont partis. Je sors le dernier. Les insurgés ont fait une barricade derrière l’Hôtel-de-Ville, et arrivent en même a temps sur la place, en tirant des coups de feu.

Signé : Jules Ferry. »

C’est ainsi que l’Hôtel-de-Ville se trouva occupé par l’insurrection une demi-heure après. Les insurgés eux-mêmes ignoraient ce qui se passait dans l’intérieur de l’édifice. Ils furent assez surpris, m’a-t-on dit, de trouver les portes ouvertes.

(Enquête parlementaire. Déposition de M. Jules Ferry.)

Ainsi le général en chef Vinoy, le préfet de police général Valentin, le ministre de l’intérieur Picard furent tous