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n’osant pas entamer la lutte avec Paris, ni surtout avec M. Thiers, et ne comptant guère sur l’intervention des maires, ni sur le résultat des propositions de conciliation qui avaient été faites, et qu’ils avaient acceptées en partie.

Le général Vinoy avait exigé un ordre écrit d’évacuer Paris. Le ministre de la Guerre le lui ayant donné, tout était consommé, On pouvait cependant évacuer la ville, sans abandonner les forts. Le général Vinoy n’avait pas d’ordres concernant les forts. Il a déclaré dans l’Enquête : « C’est M. Thiers qui a donné l’ordre de renvoyer la brigade Daudel qui occupait les forts. » Les ministres n’avaient plus ni autorité ni vouloir.

Le général d’Aurelle de Paladines n’assista qu’en partie à la réunion, son remplacement étant déjà décidé. C’était le premier point, le seul aussi sur lequel on était tombé d’accord, pour donner satisfaction aux demandes de la délégation des maires.

Ce général, avec un dépit mal dissimulé, a rendu compte, en ces termes, de la réunion chez le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, Calmon, où il peint bien les sentiments d’inquiétude des ministres. Il fait même ceux-ci peut-être plus pusillanimes qu’ils ne le furent en réalité.

Bien que je fusse dans la pièce à côté, je remarquai que le trouble était assez grand. Cette réunion, si je puis m’exprimer ainsi, était faite d’une manière clandestine. On avait craint de donner l’éveil à la populace. On allait même jusqu’à se préoccuper de savoir si les voitures qui stationnaient en bas devaient y rester. Quelques-uns avaient émis qu’il fallait répartir ces voitures. Il n’y en avait guère que quatre ou cinq à la porte de M. Calmon, pourtant certains disaient qu’il fallait les disperser d’un côté ou d’un autre, de manière à les retrouver dans le voisinage. Quant à l’agitation, elle était grande, très grande. J’ai quitté le commandement à onze heures du soir, par ordre de MM. Picard et Jules Favre, c’est alors que je me suis rendu à l’École militaire.