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cœur, que lui fit un dément, nommé Aubertin, à abréger son existence.

Adversaire résolu du cléricalisme, marié civilement, à une époque où les unions sans prêtre étaient la grande exception, il assuma de vivaces animosités et, contre lui, les rancunes religieuses s’unirent aux haines de partis. Legrand acte de sa vie fut la loi sur l’instruction publique, laïque, gratuite, obligatoire, qui a changé profondément la société française. Cette réforme, avec l’avènement du suffrage universel, qu’elle aurait dû précéder, constitue la plus grande révolution de notre histoire moderne.

Ce grand et durable bienfait doit faire pardonner à son auteur bien des résistances aux vœux de la démocratie, et impose l’indulgence aux vaincus de 71.

Le progrès social et la république démocratique, pour laquelle luttèrent et périrent les hommes de la Commune, eussent-ils été réalisables, et même aurait-on pu en préparer les voies et le succès, chaque jour plus certains, si Jules Ferry, par sa ténacité, son autorité et son influence, n’avait pu donner au peuple cet outil d’émancipation et de bien-être : l’Alphabet, sans lequel le fusil et le bulletin de vote ne sauraient être, bien souvent, que des instruments de servitude ou de tyrannie ?

M. THIERS SE SAUVE

Pendant que Jules Ferry, le 18 mars, se préparait à défendre à outrance l’Hôtel-de-Ville, M. Thiers se disposait à partir, bientôt était déjà loin.

Le plan de M. Thiers était non seulement d’enlever les canons, de terroriser Montmartre, Belleville, les quartiers populaires, mais surtout de procéder à un désarmement général de toute la garde nationale, amie de l’ordre ou non.