Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

légendaires, elle partage des animadversions et propage des mépris, répétés et transmis à la façon des perroquets, rarement motivés par la connaissance des faits. Il est, certes, permis d’attaquer, de condamner la Commune. Mais il faut savoir pourquoi. Tout homme a le droit de juger le passé. Les ancêtres sont justiciables des descendants. Ceux-ci ont le pouvoir, et le devoir aussi, de les traîner à la barre de l’opinion, et de les condamner ou de les absoudre, mais l’arrêt doit être motivé.

Un homme d’État a dit, avec une grande énergie, qu’il fallait accepter la Révolution française en bloc. C’est une opinion louable et pratique, bien que tout à fait contraire à l’esprit d’examen, à la critique, à la philosophie de l’Histoire. La principale objection à l’admiration en bloc, c’est qu’elle comporte et provoque la haine en bloc, antinomie qui peut, dans les deux cas, être injuste, excessive ou déraisonnable. Mais encore faut-il connaître les parties de ce bloc, encore doit-on se rendre compte des faits et des conséquences, qui peuvent entraîner le plateau de la balance, et l’emporter dans le sens du blâme ou de l’approbation.

Actuellement, contrairement à ce qui s’est produit pour les hommes et pour les événements de 89 et 93, la Commune est l’objet d’une suspicion, et souvent d’une exécration, en bloc. C’est une injustice. Elle ne provient pas toujours du parti pris, de la mauvaise foi, de l’atavisme, des préjugés de castes, de l’influence des milieux, de passions héréditaires ou fortuitement acquises, ni d’intérêts de parti. L’ignorance en est le plus généralement la cause. On lance l’anathème contre toute une époque, parce qu’on ne la connaît pas bien. C’est un phénomène ordinaire. On est