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isolément. Les uns l’ont étudiée comme une sorte de champignon monstrueux, poussé sur le fumier d’une cité en fermentation, végétation anormale et cryptogamique, sans racines, sans sol ensemencé. D’autres l’ont considérée comme une vigoureuse fleur de liberté, surgie soudainement dans le sillon arrosé du sang de 1870, et qu’une rafale brusque a courbée et arrachée. La Commune n’a pas ce caractère anormal et extra-naturel. Un mouvement populaire tel que le soulèvement du 18 mars 1871 ne saurait être considéré comme un accident, comme une floraison phénoménale et d’une éclosion spontanée.

La Commune eut ses précédents, ses préparations, et c’est en fouillant le passé qu’on peut retrouver ses racines.

Violente dans son principe, hésitante et relativement modérée dans ses actions, ayant laissé un souvenir d’horreur dû à des excès fortuits, maudite pour des faits impulsifs commis par des foules ou des individus demeurés anonymes, car le conseil communal n’a ordonné aucune des résolutions terribles, suggérées par le désespoir, aux heures suprêmes de la défaite, la Commune a été, jusqu’ici, l’objet d’une indignation factice et conventionnelle.

Il est évident que les partisans des anciens régimes, les trembleurs de la bourgeoisie et du haut commerce, les cléricaux, les écrivains mondains, les gens de luxe et de plaisirs, indifférents à tout ce qui est hors de leur cercle étroit, ne sauraient avoir pour la Commune que des sentiments peu bienveillants. Mais la grande masse du pays doit en posséder d’autres. Mal instruite des événements, la démocratie en général a sur cette époque des opinions toutes faites, injustes ou erronées ; elle admet des appréciations